Pastiche baroque sicilien de la Cappella Mediterranea
Programme réalisé au fil des concerts après sa création au Festival d'Ambronay en 2014, le pastiche Amore siciliano mêle musiques savante et populaire du XVIIe et XVIIIe siècles pour séduire un large public.
Par une nuit de Noël, la rencontre fortuite avec la jeune Cecilia, fiancée à Giuseppe qui se trouve emprisonné en raison de son engagement en faveur de l'indépendance de la Sicile, décide le noble Don Lidio à conquérir le cœur de la jeune femme. Et cela malgré le lien qui l'unit à Donna Isabelle, son épouse, qui tient le rôle de narratrice dans ce drame concocté de toute pièce par la Cappella Mediterranea selon le thème de la chanson traditionnelle calabraise La canzone di Cecilia. Don Lidio promet ainsi à Cecilia la libération de son bien aimé si elle cède à ses avances. Celle-ci y concède sous les lamentations de Donna Isabella. Trahie par ce prétendant perfide après avoir aperçu par la fenêtre son fiancé enchaîné et entrainé vers une condamnation à mort sans appel, Cecilia se donne la mort, toujours sous les lamentations de l'épouse du traitre.
A l'origine de ce projet la soprano Francesca Aspromonte a incité cet ensemble spécialisé en musiques anciennes, de mêler des chansons calabraises, siciliennes et napolitaines du XVIIe et XVIIIe siècles avec des musiques de compositeurs plus connus comme Alessandro Scarlatti, sur des arrangements du guitariste-théorbiste Quito Gato. L'originalité de ce disque réside dans une composition de Leonardo García Alarcón qui s'est essayé à une fugue à cinq voix sur La canzone di Cecilia pour démontrer les similitudes entre musiques savante et populaire.
Comme à son habitude, la démarche musicologique de la Cappella Mediterranea est très affirmée, ici avec la découverte d'un fonds maltais de la cathédrale Saint-Jean. Il devient habituel que les artistes spécialisés dans ce répertoire créent des « opéras imaginaires » pour accompagner l'auditeur à de nouvelles découvertes, un travail souvent fondé par la renaissance de pratiques musicales historiques, qui ici sont absentes. Il est dommage que le livret de présentation n'accompagne pas mieux l'auditeur dans cette histoire en un prologue et deux actes, comme dans la création artistique au coeur de ce programme : seul un entretien avec le chef d'orchestre est proposé au détenteur de ce disque.
Quelle que soit l'approche autour de cet enregistrement, il est évident que la diversité des univers qu'offre cette ligne directrice est séduisante, entre la Tarantella española vigoureuse de Santiago de Murcia (1673-1739) et Diego Fernández de Huete (1635-1713) et la mélancolie de l'air de Tommasco Carapella (1665-1736) Ho vinto, amor – « Dolce è il penare », entre l'audace de la Dispietata Pietate de Sigismondo d'India (1582-1629) et la sérénité morbide d'Alessandro Scarlatti dans Mori, mi dici – « Con quel dolce parlar », ou encore entre le raffinement de l'air d'Alfonso M. de' Liguori (1696-1787) Fermarono i cieli et la vivacité de l'air populaire U'ciucciu.
Ce disque bénéfice de surcroit d'interprètes de premier ordre ayant l'habitude de travailler ensemble, tous participant au déploiement d'une belle expressivité riche en intentions et en nuances. L'articulation travaillée et la projection vocale maitrisée par chacun mettent à l'honneur la qualité des textes choisis, dans un panel de couleurs vocales diversifié et contrasté. Soutenus par le positif de leur chef d'orchestre, la Cappella Mediterranea délivre, dans une variété d'ambiance foisonnante, un jeu dynamique et vif, tout autant qu'élégant.










