Lors de notre chronique consacrée au superbe enregistrement de la non moins superbe musique du film Les Neiges du Kilimandjaro (1952) chez Naxos, nous déplorions l'absence de nouvelles parutions marquant le centenaire de la naissance de Bernard Herrmann (1911-1975), l'un des créateurs les plus originaux pour le cinéma. C'était compter évidemment sans Universal Eloquence Australie qui à l'époque n'était pas distribué chez nous, mais qui avait réédité à cette occasion tous les enregistrements de musiques de film (y compris les siennes) que Bernard Herrmann avait dirigées pour la célèbre série Phase 4 Stereo de Decca. Comme dorénavant Decca Eloquence est aisément disponible grâce aux bons soins de Codaex, il n'y a guère à hésiter à acquérir toutes ces merveilles de l'Âge d'Or musical du cinéma. À vrai dire, il manque dans cette série la musique magnifique que Herrmann avait composée pour le film Obsession (1975) de Brian de Palma, et enregistrée également pour Phase 4 Stereo Decca : espérons donc que Decca Eloquence comble bientôt cette lacune.
Le premier double CD regroupe intelligemment les musiques de Bernard Herrmann associées aux films de genres psychologique, fantastique, de fantaisie, ou de science-fiction, tous où il excellait : du premier nous avons ce monument cinématographique qu'est Citizen Kane (1940), puis Jane Eyre (1944) et Les Neiges du Kilimandjaro (1952) ; des deux genres suivants, qui se confondent souvent, font partie Le Septième Voyage de Sinbad (1958), Les Trois Voyages de Gulliver (1960), L'Île Mystérieuse (1961), Jason et les Argonautes (1963), la plupart avec les effets spéciaux du génial Ray Harryhausen ; au dernier sont associés Le Jour où la Terre s'arrêta (1951), Voyage au Centre de la Terre (1959) et Fahrenheit 451 (1966).
Mais il ne faut pas oublier les films d'Alfred Hitchcock avec qui Herrmann eut la plus longue collaboration. Leur musique est présente dans le deuxième double CD : Mais qui a tué Harry ? (1956), Sueurs Froides (1958), La Mort aux Trousses (1959), Psychose (1960), Pas de Printemps pour Marnie (avec Sean Connery jeune, 1964). De même il ne faut guère perdre de vue que Bernard Herrmann fut l'un des plus grands défenseurs de la musique de ses confrères, notamment de Charles Ives à une époque où ce dernier était considéré comme un doux excentrique : il est bon de rappeler que Stokowski, bien avant d'être le brillant avocat de Ives que l'on sait, avait répliqué à Herrmann qui l'incitait à programmer ses œuvres : « Keep Ives for yourself !… »
Aussi nous trouverons également sur ce deuxième album un choix de musiques de film de divers compositeurs, essentiellement anglais, toutes dignes de survivre, mais dont il convient de surtout retenir celles de William Walton (superbes prélude de Richard III, 1956, et ballet d'Escape Me Never, 1935), de Constant Lambert, trop oublié de nos jours (admirable Anna Karénine, 1948) et d'Arthur Bliss (envoûtant La Vie Future, 1936). Et finalement, Bernard Herrmann fut certainement un pionnier dans l'enregistrement de cette grande sélection d'Hamlet (1964) de Chostakovitch.
Le troisième double CD regroupe une fois de plus judicieusement, tous les enregistrements Phase 4 Stereo Decca de musiques de film de Miklós Rózsa : ceux dirigés par le compositeur même (Ben-Hur, Quo Vadis) avaient déjà connu une réédition éphémère sur CD London, puis chez Dutton Vocalion, cette dernière publication ayant déjà fait l'objet d'une chronique détaillée à laquelle nous renvoyons le lecteur. Mais cette édition Decca Eloquence est dorénavant préférable à Vocalion, car en plus de détenir les bandes originales, elle a l'avantage d'y joindre la suite orchestrale de Jules César (1953), cette fois dirigée par Bernard Herrmann qui fut également le premier à mettre en disque cette musique de son confrère et ami. À notre connaissance, c'est la seule collaboration de Miklós Rózsa à un film de Joseph L. Mankiewicz, qui mettait en vedette, en de superbes images noir et blanc, ces trois monstres sacrés du cinéma, Marlon Brando (Marc Antoine), James Mason (Brutus) et John Gielgud (Cassius).
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