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Chaque mélomane sait les nombreux aléas qui caractérisent l’histoire de la salle Pleyel. Détruite par un incendie neuf mois après son édification en 1927, elle connaît trois propriétaires successifs jusqu’à sa restauration, de 2002 à 2006. Si elle a désormais retrouvé ses lettres de noblesse, c’est au prix de nombreux bouleversements.

L’histoire de la manufacture de pianos du même nom est tout aussi mouvementée. Fondée en 1807 par Ignace Pleyel, elle a dominé, à côté d’Erard, la facture pianistique française du XIXe siècle. Très vite, Pleyel devient le fournisseur de l’impératrice Joséphine ainsi que de toutes les cours européennes, et exporte en Europe, en Amérique et en Orient. Lorsqu’Ignace Pleyel s’éteint en 1831, son fils, Camille, reprend le flambeau de l’illustre maison. C’est sous sa direction que la marque acquiert le prestige qu’on lui connaît aujourd’hui. Elle est alors liée au mouvement romantique, et des compositeurs tels que Chopin ne jouent que sur des pianos Pleyel. Elle a véritablement influencé la création musicale du XIXe siècle et de la première moitié du XXe. La maison connaîtra à partir des années 50 des bouleversements d’ordre financier qui compromettent son prestige. Les pianos sont alors produits en Allemagne – entre 1961 et 1996 – et à Alès, à partir de 1996. A l’automne 2007, un nouvel atelier de fabrication inauguré à Saint-Denis permet à la maison Pleyel de renouer avec la haute facture instrumentale d’antan, tandis que dans un même élan la salle symphonique connaît un renouveau.

Les apports de la maison Pleyel à la facture pianistique sont considérables. Ignace Pleyel est le premier à utiliser un cadre métallique dans ses pianos (son fils Camille introduira quant à lui le barrage en fer dans les pianos à queue). Il invente par ailleurs le son dit « prolongé » et veille également à donner au clavier une parfaite égalité. Aujourd’hui la maison collabore avec des décorateurs qui rivalisent d’audace pour renouveler l’esthétique de l’instrument. De nombreux pianos customisés voient le jour ; on peut en admirer quelques exemplaires dans les show-rooms réservés à cet effet à l’atelier de Saint-Denis ou à la salle Pleyel.

Déployé sur une surface 1200 m2, le nouvel atelier réunit l’ensemble du processus de fabrication des instruments dans un même lieu : machine à filer les cordes, presses, palans, gabarits… Atelier de conception et de réalisation de pianos haut de gamme, il comprend un bureau d’études intégré, des ébénistes, techniciens, harmoniseurs et accordeurs. 13 artisans travaillent en commun, dans le calme, la précision et la patience : trois conditions nécessaires à la réalisation d’instruments uniques et exceptionnels.

Le nouveau P. 204 est le premier piano entièrement conçu dans le nouvel atelier de fabrication. Il sera inauguré au prochain Musicora. Héritier moderne du mythique modèle n°3 – un piano de 2m04 construit dans les années 1930 qui fut choisi par les grands pianistes du moment, Alfred Cortot, Francis Planté – ce piano demi-queue doit sa conception sonore au très réputé facteur de pianos français Stephen Paullelo. La marque retrouve avec cet instrument son identité. L’essayer est une expérience forte : on comprend pourquoi la maison Pleyel plaisait tant à Chopin : le perlé du son n’est jamais altéré par la puissance sonore. Les pianissimi sont aisés, et les forte, sans être tonitruants, bénéficient d’une projection exceptionnelle. Le toucher est lui aussi de qualité supérieure : réactif, il épouse le geste de l’interprète, facilitant presque l’exécution.

La maison Pleyel semble pouvoir de nouveau contrecarrer l’hégémonie de certains de ses concurrents en apportant à la facture pianistique une qualité et une diversité dont elle a tant besoin.

Crédit photographique : © Jérémie Bouillon (show-room) © Philippe Gontier (atelier)

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