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Requiem de Verdi par Valery Gergiev, l’effroi et le néant

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Baden-Baden. Festspielhaus. 17-VII-2010. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Requiem. Viktoria Yastrebova, soprano ; Olga Borodina, mezzo-soprano ; Sergei Semishkur, ténor ; Ildar Abdrazakov, basse. Chœur et Orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg (Chef de chœur : Andrei Petrenko), direction : Valery Gergiev

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Au lendemain d'un Viaggio a Reims décevant, le plat de résistance du Festival d'été 2010 de Baden-Baden pouvait bien être le Requiem de réunissant, sous la baguette de , les forces chorales et orchestrales du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg.

Et, de fait, elles furent fidèles à leur réputation. L'orchestre, chantant à l'unisson cette partition qui lui convient bien mieux que celle de Rossini, fit valoir le velouté de ses cordes, la douceur de ses bois, l'héroïsme de ses cuivres, l'énergie de ses percussions. Le chœur impressionna la salle par sa netteté, sa vaillance, sa subtilité aussi, son homogénéité jamais prise en défaut. Menant ses troupes d'une main remarquablement économe de gestes et néanmoins ferme, le chef Valéry Gergiev en tira des pianissimos extatiques – la manière dont il fit naître progressivement la musique du néant, au début du Requiem aeternam initial, était confondante de beauté – comme des fortissimos terrifiants – un Dies irae titanesque, un Tuba mirum tellurique . On sent la grande habitude qu'ont ces cent cinquante exécutants à travailler ensemble dans la précision des attaques, dans la parfaite mise en place du Sanctus ou de la fugue finale, dans l'attention et la réactivité de chaque instant qu'ils offrent à leur chef.

Mais le Requiem de Verdi, ce sont aussi quatre solistes, où s'affrontaient trois générations de la troupe du Marinsky, dont les plus jeunes sortent même de son Ecole pour Jeunes Chanteurs (la soprano en 2008 et le ténor en 2007). Force est de constater que la lignée montante a encore du chemin à parcourir pour égaler ses aînés. La soprano ne fut même jamais à la hauteur de l'enjeu ; à la peine dans le registre grave sonnant étouffé, aux aigus graciles et émaciés manquant d'harmoniques pour transpercer les ensembles, elle se montra totalement dépassée par les incantations du Libera me, Domine final. On ne trouve décidément pas une Anna Netrebko à chaque génération ! Le ténor s'en est mieux sorti, malgré un timbre un peu trop claironnant, en particulier dans un Hostias soigneusement nuancé et allégé. La basse a fait ses débuts au Mariinsky en 1998. Avec lui, le niveau vocal et interprétatif s'éleva nettement ; Mors stupebit tendu par la longueur du souffle et la variété des couleurs et du phrasé, Confutatis maledictis parfaitement assuré par la vaillance de l'aigu et le soin du legato, même si ce timbre est presque trop suave et pas assez sombre pour parvenir à effrayer. Cependant, celle qui domina tout le quatuor fut la mezzo-soprano , presque un vétéran puisqu'elle rejoignit la troupe du Mariinsky en 1987, et qu'on fut ravi de retrouver dans une forme aussi olympique. En réserve de puissance, en homogénéité des registres, en magnificence du timbre, elle en remontra à tous ; Liber scriptus halluciné, Recordare intense de tenue et de legato, nuances, aigus filés, une prestation somptueuse de bout en bout.

Grâce à elle, grâce à la valeur de l'orchestre et du chœur, ce Requiem de Verdi fut finalement une soirée marquante. Dommage que le curieux choix d'un quatuor de solistes trop déséquilibré soit venu en ternir la perfection formelle.

Crédit photographique : © Sasha Guzov

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Baden-Baden. Festspielhaus. 17-VII-2010. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Requiem. Viktoria Yastrebova, soprano ; Olga Borodina, mezzo-soprano ; Sergei Semishkur, ténor ; Ildar Abdrazakov, basse. Chœur et Orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg (Chef de chœur : Andrei Petrenko), direction : Valery Gergiev

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