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Coup d’envoi de la 9ᵉ Biennale de quatuors à cordes à la Philharmonie

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Paris
9ᵉ Biennale de Quatuors à cordes du 09 au 19-2020
Philharmonie de Paris 11-01-2020
15h : Amphithéâtre du Musée
Christian Rivet (né en 1964) : Quatuor I « Amahlathi amanzi » (« Forêt d’eau ») pour quatuor à cordes ; Wolfgang Rihm (né en 1952) : Quartettstudie (Étude pour quatuor) pour quatuor à cordes ; Robert Schumann (1810-1856) : Quatuor à cordes en la majeur op.41 n°3. Quatuor Van Kuijk : Nicolas Van Kuijk, Sylvain Favre-Bulle, violon ; Emmanuel François, alto ; François Robin, violoncelle.
17h30 : Studio
György Ligeti (1923-2006) : Quatuor à cordes n°2 (extrait) ; Ōtomo Yoshihide (né en 1959) : Walk on by sonneurs, pour quatre sonneurs ; Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Quatuor à cordes n°11 en fa mineur op.95 « Quartetto serioso » ; Frédéric Aurier (né en 1976) : Antienne pour les jours de fièvre, pour quatuor de sonneurs et quatuor à cordes. Wolfgang Mitterer (né en 1958) : Run, pour quatre sonneurs et électronique. Quatuor Bela : Frédéric Aurier, Julien Dieudegard, violon ; Julian Boutin, alto ; Luc Dedreuil, violoncelle ; Sonneurs : Erwan Keravec, cornemuses ; Guénolé Keravec, trélombarde ; Erwan Hamon, bombarde ; Mickaël Cozien, biniou.

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En phase avec l'année Beethoven, la 9ᵉ à la Philharmonie de Paris fête le maître de Bonn en inscrivant l'intégrale de ses seize opus au centre d'une affiche qui fait également la part belle à la création. En témoignent les deux premiers concerts de la manifestation.

Quatuor-Van-Kuijk-by-Nikolaj-Lund

Élu Rising Stars 2017-2018, le jeune quatuor français Van Kuijk, fondé en 2012, avait eu le privilège d'ouvrir la Biennale de Quatuors à cordes en 2018. On les retrouve en tête d'affiche de cette 9ᵉ édition, dans un programme où Schumann coudoie la création d'aujourd'hui.

Amahlathi amanzi  (« Forêt d'eau » en zoulou), qui débute le concert, est le premier quatuor à cordes de Christian Rivet, que les Van Kuijk ont créé au Concertgebouw en octobre dernier. Loin du modèle académique, la pièce fait défiler sept « images », au sens debussyste du terme, distribuées selon une forme concentrique autour de la quatrième pièce, L'Oiseau origami. Musique minimale et à bas voltage, la pièce multiplie les subtilités acoustiques (utilisation des sourdines, jeu percussif sur la corde avec la vis de la baguette, frottement de l'archet sur le bois de l'instrument, sons filtrés des harmoniques extrême-aigus) au sein d'une texture toujours fragile et à la marge du silence. L'interruption systématique due au changement de partition à la fin de chaque courte pièce nuit un rien à l'écoute et au flux poétique d'une telle écriture. La tablette ici s'impose !

Quartettstudie  (« Étude pour quatuor ») n'est certainement pas la pièce la plus séduisante de . Écrite pour le Concours international de musique de l'ARD de Munich, elle juxtapose un ensemble de séquences hétérogènes où s'exerce l'écriture dialogique très personnelle du compositeur allemand. Les contrastes sont très (trop) soulignés par les Van Kuijk sans que s'éclaire pour autant la dramaturgie. On peine à suivre la trajectoire. Point de Beethoven pour finir (alors qu'ils en avaient joué l'année dernière) mais du Schumann, avec l'opus 41 n° 3 écrit en 1842 et dédié à Félix Mendelssohn. Suivant le modèle de son aîné (Beethoven), Schumann met le scherzo en deuxième position. Si les dynamiques sont toujours un peu outrées et l'équilibre sonore pas toujours bien réglé dans les deux premiers mouvements, on assiste à de beaux moments d'échanges entre les quatre musiciens dans l'Adagio molto du troisième mouvement. Le Finale, Allegro molto vivace, est indéniablement le plus réussi, où le geste se libère et la synergie des quatre archets opère. Entre sections virtuoses et rythme populaire, les Van Kuijk mettent toute l'énergie de leur jeunesse pour terminer ce concert avec brio.

Sur le même plateau, deux formations que tout sépare

Quatuor-Bela-by-Sylvain-Gripoix
Le Quatuor Béla sait nous surprendre, en conviant à ses côtés des partenaires improbables, tel cet orgue de foire géant dans son dernier spectacle « Barbarie » vu au festival Musica de Strasbourg. Trop bien habitué peut-être, nous nous attendions à une proposition similaire avec, cette fois, les quatre sonneurs (cornemuse, bombarde, trélombarde et biniou) invités à partager la scène du Studio de la Philharmonie. De fait, les deux formations sont réunies, dans le double quatuor de , Antienne pour les jours de fièvre : « L'absurdité de cette idée m'a beaucoup motivé ! », déclare le compositeur (et violoniste du Quatuor Béla) s'agissant d'une pièce où l'humour et la distance sauvent l'entreprise. Le reste du programme consiste dans un enchaînement plus ou moins fluide de cordes intimes, tel le cinquième mouvement (et seulement lui) du Quatuor n° 2 de Ligeti (superbement restitué, précisons-le), et de grandes tonitruances d'instruments de plein-air saturant l'espace du Studio.

Peu convaincante, Walk on by sonneurs, du Japonais Ōtomo Yoshihide, est une performance interrogeant le rapport entre son et espace, où les quatre sonneurs, , Guénolé Keravec, Erwan Hamon et déambulent sur le plateau en croisant leurs trajectoires sonores, du souffle (énergie première) à la couleur (très intense) du son. Dûment écrite quant à elle, la pièce de , Run, pour quatre sonneurs et électronique, impressionne davantage, même si l'espace (et l'écoute) rapidement saturé par le jeu haut et fort des instrumentistes, ne laisse guère apprécier le travail d'intégration entre les deux sources sonores.

On ne l'attendait pas dans un tel contexte, mais Beethoven est aussi à l'affiche (biennale oblige), avec le Quatuor n° 11 en fa mineur dit « Quartetto serioso », une appellation donnée par l'éditeur mais approuvée par Beethoven. Extrêmement concentré (quatre mouvements en à peine vingt minutes !), l'opus 95 du maître de Bonn exprime l'urgence et la révolte, dans des tempi parfois extrêmes et une manière nerveuse qui exaspère la dramaturgie. Autant d'aspects qui ressortent de l'interprétation des Béla, accusant les ruptures et la ciselure des thèmes dans un premier mouvement fulgurant. Les cinq notes dépressives du violoncelle (théâtral ) au début de l'Allegretto ma non troppo modifient radicalement le contexte, laissant advenir l'écriture fuguée sous les archets des quatre interprètes. Le troisième mouvement, attacca, est un espace de lutte, plus âpre encore que le premier qu'il semble prolonger. C'est un scherzo tiré au cordeau (Allegro assai vivace ma serioso) par les musiciens dont le jeu ductile suit pas à pas la trajectoire mouvante. Le tempo du finale est risqué (Allegro agitato) mais ils l'assument en virtuoses, dans une frénésie sonore étourdissante autant que maîtrisée, ménageant une dernière accélération dans la coda : « aussi vite que possible », aurait pu noter Beethoven à l'instar d'un Ligeti.

Crédit Photographique : © : Nikolaj Lund ; Quatuor Bela : © Philharmonie de Paris

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Christian Rivet (né en 1964) : Quatuor I « Amahlathi amanzi » (« Forêt d’eau ») pour quatuor à cordes ; Wolfgang Rihm (né en 1952) : Quartettstudie (Étude pour quatuor) pour quatuor à cordes ; Robert Schumann (1810-1856) : Quatuor à cordes en la majeur op.41 n°3. Quatuor Van Kuijk : Nicolas Van Kuijk, Sylvain Favre-Bulle, violon ; Emmanuel François, alto ; François Robin, violoncelle.
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György Ligeti (1923-2006) : Quatuor à cordes n°2 (extrait) ; Ōtomo Yoshihide (né en 1959) : Walk on by sonneurs, pour quatre sonneurs ; Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Quatuor à cordes n°11 en fa mineur op.95 « Quartetto serioso » ; Frédéric Aurier (né en 1976) : Antienne pour les jours de fièvre, pour quatuor de sonneurs et quatuor à cordes. Wolfgang Mitterer (né en 1958) : Run, pour quatre sonneurs et électronique. Quatuor Bela : Frédéric Aurier, Julien Dieudegard, violon ; Julian Boutin, alto ; Luc Dedreuil, violoncelle ; Sonneurs : Erwan Keravec, cornemuses ; Guénolé Keravec, trélombarde ; Erwan Hamon, bombarde ; Mickaël Cozien, biniou.

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