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Tremplin pour la nouvelle génération à la Philharmonie de Paris

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Paris. Cité de la Musique. 12-III-2022. Tremplin de la création : 28 créations avec les ensembles Cairn, Multilatérale, l’Ensemble du CNSMD de Lyon et l’Ensemble Intercontemporain

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Vingt-huit créations et des commandes passées à de tout jeunes compositeurs par la Philharmonie de Paris et l' : c'est le challenge du Tremplin de la création relevé par quatre ensembles dédiés à la musique d'aujourd'hui qui se sont succédés, de l'Amphithéâtre de la Cité de la Musique à la Salle des concerts, dans un marathon musical inédit.

Victime de la pandémie, la première édition du Tremplin de la création – projet initié par lorsqu'il était encore directeur du département Concerts et Spectacles de la Philharmonie de Paris – n'avait pas pu accueillir de public en 2021. Cette deuxième édition, sous la houlette de son successeur , s'est déroulée en quatre concerts réunissant public, jeunes créateurs sélectionnés, programmateurs de concerts à la recherche de jeunes talents et comité artistique (compositeurs, éditeurs, professeurs de composition, directeur d'ensemble, etc.) chargés de dialoguer avec eux. Deux conditions sont requises pour participer à ce grand forum de la création : avoir moins de 35 ans et écrire une pièce d'ensemble de dix minutes au maximum. Il est demandé également au comité de sélection un strict respect de la parité et un choix ouvert à l'international, privilégiant les jeunes artistes qui n'ont pas encore eu l'opportunité de se faire jouer sur la scène parisienne. Sept pièces sont inscrites au programme de chaque phalange, dans un effectif instrumental sensiblement renouvelé d'une formation à l'autre et il est également demandé aux ensembles de présenter toutes les œuvres à l'affiche.

C'est le très beau concert de l'ensemble Cairn et la pièce de l'Ukrainienne (hasard opportun) qui débutent cette journée marathon (de 11h à 19h30) : flûte, clarinette, trio à cordes, piano et percussion étaient mis à la disposition des sept compositeurs et compositrices qui ont écrit pour cet ensemble fondé par Jérôme Combier et dirigé par Guillaume Bourgogne. Dans Seamy Side, musique de l'ombre, presque fantomatique, Katarina Gryvul sollicite l'électronique au côté d'instruments graves comme la flûte et la clarinette basses. L'Espagnol Manuel Hidalgo Navas utilise le synthétiseur dans self-absorption, une écriture regardant vers la saturation. Citons encore la pièce de , La joie spacieuse, explorant les ressorts de l'énergie et du mouvement ainsi que le travail très fin sur les textures de Nicolas Brochec dans En demi-teinte. En revanche, Dixit de ne fait appel à aucun instrument. La pièce électroacoustique fait défiler les images sonores à travers les haut-parleurs courant sur le plafond de l'Amphithéâtre : heureuse initiative de la part de Cairn proposant une autre situation d'écoute dite acousmatique.

Six instruments mettant la harpe en vedette constituent l'effectif de l'ensemble Multilatérale fondé par Yann Robin et dirigé par Léo Margue qui remplace le chef attitré Léo Warynski. Parmi les sept créations, deux pièces se jouent en solo : Fly on the ceilling pour harpe (Aurélie Saraf) de l'Italien Luca Ricci et Scène VI pour flûte solo (Matteo Cesari) de , déjà connue du public parisien. Mentionnons également dans la veine narrative, Le Papier peint de Vincent Portes, l'esprit contestataire de Rash d'Aline Gorisse et l'évocation très réussie de Escenas mitológicas según Tiziano où l'Espagnol tente une translation sonore de l'univers du Titien.

 

Les sept compositeurs et compositrices présentés par l'Ensemble du CNSMD de Lyon sous la direction artistique de l'éminent percussionniste , poursuivent ou terminent leur cursus dans l'institution. Parmi les six instruments convoqués, notons l'importance accordée aux cordes graves (omniprésence de la contrebasse) et à la percussion. Félix Lacquement présente et dirige sa composition Saisons de la digne rage, une pièce incisive et obstinée instaurant un espace de lutte entre l'électronique et la texture sombre des cordes. Même âge (23 ans) et même obstination chez Margaux Dauby qui dirige également sa pièce pour violon, violoncelle et contrebasse. Si l'éruptif Collider de , non dirigé, semble laisser aux interprètes un espace d'improvisation, l'Italienne propose dans Collapse (piano, percussion et contrebasse) une musique pulsée et mâtinée de jazz. Offensif et percutant, Counterpunch d' fait appel au piano préparé tandis que Pêcheur de lunes d' semble obéir à la logique du rêve. L'utilisation parcimonieuse du vibraphone dans Étincelles mémorielles de participe de la poésie sonore d'une composition qui nous séduit.

Dans la Salle des concerts, l' présente des pièces de plus grand effectif (de 12 à 17 instruments). À sa tête, le charismatique assure avec la même aisance la direction et la présentation de chaque pièce. Que ce soit dans Corps de la benjamine du Tremplin (née en 2001) et États-unienne , ou dans Septiphobie du Chypriote Andreas Tsiartas ou encore impermanence de l'Américain Gleb Kanasevich, ce sont les mêmes tension, attente et angoisse, « un sentiment de fin infinie » (dixit Kanasevich) qui s'expriment à travers le ressenti d'une génération marquée de toute évidence par les années Covid. Le temps est étiré et la musique contemplative dans Heterotopia II : l'heure bleue de la Coréenne ou encore Traversées du Bleu audible de où les textures finement élaborées évoluent lentement dans la durée. crée la surprise dans TRON avec la présence au sein de l'ensemble du Mellotron (ancêtre de l'échantillonneur) mais ne balaie pas pour autant la mélancolie. Seule la Française Daphné Hejebri fait circuler l'énergie dans un espace coloré et kaléidoscopique avec White Noise, Black Hole : Satured Silence qui termine le concert sur une note plus enjouée.

Rares sont les journées portées avec un tel élan vers les nouvelles voix de la création : une initiative qu'il faut louer et qui, bonne nouvelle, est d'ores et déjà reconduite l'année prochaine.

Crédit photographique : © Ensembles Cairn, Multilatérale, EIC

 

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