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A Lausanne, Tosca chez les nazis

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Lausanne. Opéra de Lausanne. 20-III-2013. Giacomo Puccini (1858-1924) : Tosca, opéra en trois actes sur un livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica. Mise en scène : Giancarlo Del Monaco. Décors et lumières : Daniel Bianco. Costumes : Jesus Ruiz. Avec Annalisa Raspagliosi, Floria Tosca ; Giancarlo Monsalve, Mario Cavaradossi ; Giorgio Surian, Scarpia ; Daniel Golossov, Cesare Angelotti ; Marcin Habela, Il sagrestano ; André Gass, Spoletta ; Sacha Michon, Sciarrone ; Juan Etchepareborda, Il carciere ; Mathilde Monfray, le pâtre. Chœur de l’Opéra de Lausanne, Maîtrise Horizons du Conservatoire de Lausanne (direction : Véronique Carrot), Orchestre de Chambre de Lausanne, direction : Roberto Rizzi Brignoli.

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Quand, cinq minutes avant le début de la représentation, un directeur du théâtre se présente devant le rideau de scène, ce n'est généralement pas pour annoncer la meilleure des nouvelles.

Ainsi, ce mercredi soir, annonce que, terrassée par la grippe, Alexandra Voulgaridou, la si magnifique Mimi de La Bohème d'Avenches ne chanterait pas cette seconde production lausannoise.

Mais comme « l'opéra must go on », la soprano grecque se voyait remplacée par la romaine arrivée en catastrophe à peine deux heures avant le lever de rideau ! Un petit raccord au piano avec le chef d'orchestre, quelques ajustements aux costumes de scène, et hop. Fort heureusement, connaissait déjà cette production pour l'avoir chantée à l'Opéra de Valladolid en janvier. Tout semble simple avec juste, un petit détail : elle n'a pas eu le temps de connaître les chanteurs de la production de Lausanne.

Ce préambule pour signifier et comprendre les difficultés principalement musicales rencontrées par les protagonistes. En particulier, pour la soprano (Floria Tosca), impressionnante à plusieurs reprises dans son investissement théâtral. On se souviendra de l'émotion qui se dégage de la scène qui confronte Tosca à l'entreprise de séduction de Scarpia, tournant en cercles dans la chapelle de l'église de Sant'Andrea. A cette occasion, la soprano italienne lance un « Ed io venivo a lui tutta dogliosa » de chair chargé d'une émotion presque insoutenable. Avec une voix aux couleurs variées, une diction parfaite, elle s'empare du plateau avec talent. A cet instant, elle est Tosca. Une présence malgré tout fugitive, contrainte qu'elle est de s'adapter aux autres chanteurs.

Ainsi, Scarpia () étend son autorité malsaine sous une imposante photo d'Adolphe Hitler. Dommage que le personnage vil, veule, autoritaire, manipulateur n'apparaisse pas dans l'expression vocale du baryton . Trop soucieux d'offrir une voix, il en oublie sa théâtralité.

A ses côtés, le ténor (Mario Cavaradossi) offre un instrument vocal manquant notoirement de technique. Souvent en décalage avec l'orchestre et les autres solistes, à la limite du diapason, la diction manquant de clarté, il crie tous ses aigus rendant son discours fruste et inadapté aux situations. Si son E lucevan le stelle final reste acceptable, son Recondita armonia initial le découvre avec une vocalité vulgaire, arrachant des aigus dans une voix sans musicalité.

La mise en scène de (reprise par le chorégraphe Marco Berriel) ne bouleverse pas le cadre de l'intrigue. La transposition d'une Tosca dans l'Italie de la fin de la guerre, au moment où l'Allemagne nazie remplace le fascisme de Benito Mussolini qui venait de signer un armistice séparé avec les forces alliées, outre que se dérouler au milieu d'officiers portant brassards à croix gammée, n'amène rien à ce que la pièce de Félicien Sardou, et partant, les librettistes de Puccini, racontait. S'attachant plus aux effets de scène plus qu'à une véritable direction d'acteurs, le metteur en scène laisse les personnages exister par eux-mêmes plutôt que de leur imprimer un caractère profond et les enjeux qui les font vivre. On reste ainsi dans l'expression superficielle. Pour exemple, dans l'extraordinaire Te Deum, image choc de l'opéra, Del Monaco ne profite guère de l'intensité spectaculaire de ce moment en laissant le chœur caché derrière un grand rideau devant lequel Scarpia est seul. Parfois même, oublie les véritables enjeux du drame puccinien. A l'exemple de son Cavaradossi, qu'il fait battre à mort, est si blessé qu'il ne peut plus se relever quand le livret prévoit qu'il devra s'enfuir avec Tosca, à peine la fausse exécution a-t-elle été perpétrée.

De son côté, l' et le chef Roberto Brizzi Bagnoli ont beau faire mais la musique de Puccini, et en particulier celle de Tosca, réclame un volume sonore que la phalange lausannoise, réduite aux dimensions limitées de la fosse, ne peut offrir. L'approche chambriste se révèle au-dessus des capacités d'un moins bon qu'à son habitude.

Crédit photographique : © Marc Vanappelghem

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