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Chostakovitch et Brahms dans les valises du Philhar et de Hilary Hahn

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Paris. Auditorium de la Maison de Radio France et de la Musique. 21-IV-2023. Johannes Brahms (1833-1897) : Concerto pour violon et orchestre en ré majeur op. 77 ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n° 5 en ré mineur op. 47. Hilary Hahn, violon. Orchestre Philharmonique de Radio France, direction : Mikko Franck

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Pour ce dernier concert « in loco » avant leur départ pour une tournée en Allemagne, l' conduit par son directeur musical, , et la violoniste rodent une dernière fois leur programme associant le Concerto pour violon de Brahms et la Symphonie n° 5 de Chostakovitch à l'Auditorium de la maison ronde.

Belle affiche accrocheuse que celle proposée par le Philhar et pour leur tournée allemande qui les conduira, dans les jours à venir, successivement à Munich, Stuttgart, Cologne et Essen, sans oublier la prestigieuse Philharmonie de Berlin, avec dans leurs bagages, deux œuvres majeures du répertoire symphonique : le Concerto pour violon (1879) de Brahms, composé à l'intention de Joseph Joachim, violoniste virtuose ami du compositeur, d'une difficulté technique extrême au point de le faire considérer comme injouable… la postérité n'eut pas, heureusement, de ces coquetteries puisque l'œuvre est devenue, désormais, une pièce incontournable du répertoire violonistique plébiscitée par le public le plus exigeant du fait de ses accents tziganes et de sa virtuosité ébouriffante ; la Symphonie n° 5 de Chostakovitch, ambiguë, faussement autocritique, faisant suite au scandale de Lady Mac Beth de Mzensk, née dans la douleur des purges staliniennes (1937) : une partition d'un accès facile, haute en couleurs, susceptible de faire valoir tous les pupitres de l'orchestre ainsi que la cohérence de la direction. Force est de reconnaitre que, ce soir, l'interprétation donnée, tant par que par , s'accorde parfaitement à la qualité musicale superlative des œuvres.

Le Concerto pour violon de Brahms ouvre le concert. Hilary Hahn en offre une lecture brillante qui impressionne par sa profondeur d'intonation, à mille lieux de toute vaine et illusoire virtuosité, soutenue par un superbe et puissant accompagnement orchestral, particulièrement travaillé (clarté de la texture valorisant des performances solistiques de haut niveau, mise en place au cordeau, équilibre souverain). Dés l'entame de l'Allegro, on est saisi par l'ampleur sonore de la phalange parisienne autant que par les attaques tranchantes des cordes ou les beaux contrechants de cors soutenant tout en souplesse le legato, la virtuosité et la poésie du jeu de la violoniste qui trouvera son aboutissement dans une cadence magnifique de délicatesse et d'engagement. Le deuxième mouvement Adagio introduit par le cor et la petite harmonie fait la part belle à la complainte éthérée du hautbois d'Hèlène Devilleneuve, reprise ensuite par la soliste qui en exalte toute la tension et la profondeur. L'Allegro giocoso final, aussi exubérant qu'énergique, referme cette partition sur une cavalcade dionysiaque qui réunit dans une belle symbiose orchestre et soliste, conduisant Hilary Hahn à un juste triomphe.

Tout autre climat pour la seconde partie, entièrement dévolue à la Symphonie n° 5 de Chostakovitch dont nous livre une interprétation d'une exceptionnelle acuité, à la typologie bien affirmée qui réussit l'impossible synthèse entre lectures russes et visions plus occidentalisées, tout à la fois lyrique, douloureuse et affligée, mais sans l'urgence, ni l'âpreté d'un Kondrachine ou d'un Gergiev.

Le premier mouvement Moderato donne le ton, tout entier placé sous le poids d'une affliction dont les violons au lyrisme lugubre et les cordes graves entretiennent la pesanteur étouffante. Attaques cinglantes de cordes, appels de cuivres menaçants et stridences de la petite harmonie s'y succèdent dans une marche inexorable, écrasante, scandée par les timbales et la caisse claire. Mikko Franck, sur un tempo très lent, en souligne à l'envi tous les contrastes dans une vision presque expressionniste d'une rare intensité. Le deuxième mouvement Allegretto introduit par les cordes graves, particulièrement sollicitées ce soir par le chef (superbes contrebasses et violoncelles) ouvre un scherzo grinçant, bancale et sardonique à souhait qui fait intervenir tous les pupitres (basson, cors, violon solo) sur des parodies de valse et de marche grotesque dont l'expressivité est majorée par de pertinentes variations agogiques. Le Largo suivant s'élève comme une prière portée par des cordes divisées, vaste méditation confinant au silence juste troublée par les péroraisons du hautbois, de la clarinette et de la flute, soutenues par les notes suspendues de la harpe, du xylophone et du célesta, avant que le Finale Allegretto épique ne nous entraine dans un maelström orchestral ambigu, imprégné d'urgence, hésitant entre optimisme trompeur et détresse accablante dont les cuivres, et tout particulièrement les trombones, soulignent la présence sinistre et inquiétante…

Crédit photographique : © Anna Van Leeuwen

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Paris. Auditorium de la Maison de Radio France et de la Musique. 21-IV-2023. Johannes Brahms (1833-1897) : Concerto pour violon et orchestre en ré majeur op. 77 ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n° 5 en ré mineur op. 47. Hilary Hahn, violon. Orchestre Philharmonique de Radio France, direction : Mikko Franck

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