Concerts, La Scène, Musique symphonique

Esa-Pekka Salonen et Jean-Yves Thibaudet jouent Debussy et Stravinsky

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Paris. Philharmonie. Grande Salle Pierre Boulez. 31-I-2024. Claude Debussy (1862-1918) : La Cathédrale engloutie ; La Sérénade interrompue ; La Puerta del Vino ; Images pour orchestre ; Fantaisie pour piano et orchestre ; Igor Stravinsky (1882-1971) : Les Noces (version de Steven Stucky) assistées de la vidéo de Hillary Leben. Jean-Yves Thibaudet, piano. Chœur de l’Orchestre de Paris. Orchestre de Paris, direction : Esa-Pekka Salonen

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Pour le premier de ses trois concerts à la tête de l', et le pianiste déroulent un programme original associant des œuvres rares de (Extraits des Préludes, Images pour orchestre et Fantaisie pour piano et orchestre) et d' (Les Noces) dans la version orchestrale de , revisitée par la vidéo d'.

Copieux et original, voilà les deux maitre-mots caractérisant au mieux ce concert qui débute par des œuvres de : extraits des Préludes (La Cathédrale engloutie, la Sérénade interrompue et la Puerta del Vino), interprétées par , trois pièces qui viennent s'intercaler entre les trois Images pour orchestre (Gigues, Iberia et Rondes de printemps). Mais cette présentation un peu iconoclaste et surprenante était-elle, in fine, une bonne idée ?

L'expérience prouve que non… Fausse bonne idée assurément que cette mise en miroir dans laquelle les couleurs du piano peinent à s'imposer face aux couleurs infinies développées par l', laissant un peu apathique et bien isolé sur le bord de scène… Ainsi La Cathédrale engloutie, inspirée de la légende d'Ys, sent le naufrage, peinant à émerger d'une platitude éludant tout contraste dynamique ; La Sérénade interrompue n'est, hélas, pas mieux servie, manquant de rythme, de vigueur et de sensualité ; Seule La Puerta del Vino retrouve un peu de ces parfums, de cette langueur et de cette sensualité un peu moite d'une Espagne rêvée si chère à . Face à cette interprétation pianistique peu convaincante, les Images pour orchestre déroulent, a contrario, tout un panel de couleurs, de timbres, d'impressions olfactives et visuelles portées par une orchestration pléthorique et une direction millimétrée qui nous placent immédiatement sous le charme de cette musique qui donne vie à tout un flot d'images colorées, à cette magie de l'instant portée par des impressions musicales toutes de finesse, de délicatesse et de sensualité : Gigues, comme une page d'humour triste, sorte de « grand Pierrot », séduit par la mélancolie du hautbois d'amour qui répond au lyrisme teinté de mystère distillé par l'orchestre ; Ibéria nous invite à  une errance au rythme de Sévillane, de Habanera, aux sons des castagnettes et des tambours de basque, sur un phrasé souple, fluide, où la clarté de la mise en place et la transparence de la texture impressionnent, mettant à nu tous les détails d'une partition où les performances solistiques sont légion (hautbois, basson, cor anglais, cor et cuivres) ; Rondes de printemps émeut par son foisonnement de timbres (percussions), par la subtilités de ses transitions comme par l' incomparable maitrise rythmique  d'.

Sans doute porté par l'élan orchestral qui jamais ne faiblit, Jean-Yves Thibaudet donne ensuite une superbe et énergique lecture de la rarissime Fantaisie pour piano et orchestre (partition bien peu « debussyste ») dans un équilibre parfait et une complicité totale avec l'orchestre (cor anglais et violon solo). On y admire la variété du jeu, virtuose, tantôt confident, lyrique et poétique, tantôt orchestral, engagé et véhément apportant une conclusion jubilatoire à cette première partie.

Bien différente, la seconde partie convoque avec les Noces (1923), extraordinaire partition très rythmique et percussive, donnée ce soir dans sa version pour grand orchestre réalisée par (2005), à la demande d' qui souhaitait l'associer au Sacre du printemps… On est en droit de préférer la version « originale » pour quatre pianos, sans doute plus envoutante, plus épurée, plus rituelle, barbare et incantatoire, aux sonorités plus acérées, mais on cède rapidement sous le charme de cette version orchestrale, plus policée, plus riche en timbres, toute aussi ensorcelante et hypnotique, portée par un quatuor de solistes où se démarquent tout particulièrement la soprano Lauren Snouffer et le baryton-basse David Soar. La maitrise de la direction reste éclatante de bout en bout malgré la complexité rythmique de l'œuvre, la mise en place irréprochable, les percussions rutilantes et le chœur de l' magnifique de sonorité et de précision, autant de perfection malheureusement entachée par la calamiteuse vidéo d' (hideuse graphiquement, représentant de curieux insectes dansant dans une salle de bains !) qu'on hésite à passer sous silence… 

Crédit photographique : © Patrick Swirc

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