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Une sage Lucia di Lammermoor par Clermont Auvergne Opéra 

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Gaetano Donizetti (1797-1848) : Lucia di Lammermoor, opera seria en trois actes sur un livret de Salvatore Cammarano. Mise en scène : Pierre Thirion-Vallet. Décor : Frank Aracil. Costumes : Véronique Henriot. Lumières : Véronique Marsy. Avec : Heera Bae, Lucia ; Jiwon Song, Enrico ; Ragaa Eldin, Edgardo ; Avi Klemberg, Arturo ; Federico Benetti, Raimondo ; Noriko Urata, Alisa ; Joseph Kauzman, Normanno. Chœur Opéra Nomade. Orchestre Les Métamorphoses, direction : Amaury du Closel

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Après dix-huit mois de silence, la nouvelle entité Clermont Auvergne Opéra refoule les planches avec l'une des plus grandes œuvres du répertoire, Lucia di Lammermoor.


Pour cette nouvelle production locale, les acteurs du projet reprennent les fondamentaux de ce qui en font leur réputation : un partenariat privilégié avec la compagnie lyrique Opéra Nomade mis en place depuis 2009, renforcé ce soir par la présence en fosse de son orchestre créé en 2018 ; une nouvelle mise en scène du directeur de l'institution, ; et enfin la présence sur scène de plusieurs participants du concours international de chant organisé tous les deux ans par la maison comme la soprano (Lucia), finaliste de l'édition de cette année, le baryton (Enrico), lauréat de la 25ᵉ édition, et la soprano , lauréate de 2005 qu'on avait apprécié sous les traits de Madame Butterfly.

Pour ce monument lyrique, les parti-pris théâtraux foisonnants ne manquent pas : le regard particulièrement contemporain d'Olivier Py sur les violences faites aux femmes ; l'univers carcéral de Stefano Poda présenté à Lausanne ; l'esprit cinématographique de Katie Mitchell au Covent Garden, ou encore la perspective marquante – on s'en souvient encore ! – de Francesco Micheli plaçant trois victimes au lieu d'une au centre de l'intrigue… Comme à son habitude, ce soir, ne sort pas des sentiers battus, le metteur en scène propose une approche lisse et peu fournie de la tragédie de l'héroïne de Donizetti.

Les lieux sont plus suggérés que matérialisés : des colonnes amovibles faisant apparaître soit un papier-peint, soit un tableau de maître, agrémentées quelques fois de plusieurs lustres suspendus ; et une lumière symbolisant l'eau de la fontaine, suffisent apparemment à placer le spectateur au cœur du drame. Évolution de scène prévisible : les colonnes choient l'une sur l'autre au centre de la scène, permettant à Lucia d'évoluer en hauteur pour sa fameuse scène de la folie, mais surtout, signe de la tragédie – financière, sociale et sentimentale – que vive chacun des protagonistes, elles deviennent finalement le tombeau (deux croix à l'appui !) de cette amoureuse éperdue. Dans ce contexte, les costumes monochrome de Véronique Henriot sont naturellement mis en valeur, formidablement aboutis pour une retranscription du drame à la fin du XIXᵉ siècle, la couleur verte étant effectivement parfois associée à la mort.

Tout repose donc sur la direction d'acteurs pour alimenter le propos et faire vibrer l'auditeur. De ce côté encore, le travail paraît bien faible notamment pour le rôle-titre comme pour les chœurs, voire inexistant pour les deux protagonistes masculins. Le reste de bout en bout dans un rôle d'observateur, extérieur au drame qui se joue devant leurs yeux, même si musicalement, les choristes proposent une solide homogénéité. Pour le trio de tête, la discrète prend des attitudes conventionnelles et sans aspérités, alors que ces deux compagnons de route sont droits comme des poteaux quel que soit l'émoi qui devrait les traverser.


Vocalement, déploie un médium dense et une diction souple, soutenus par une projection irréprochable, marquant une autorité vocale qui ne saura se déployer théâtralement. Sous les traits d'Edgardo, sait affirmer un legato agréable avec de belles nuances grâce à son contrôle du souffle. , quant à elle, a de véritables capacités à alléger la voix afin de matérialiser une héroïne fragile, sans oublier les pyrotechnies vocales attendues. La soprano favorise des colorations toute en subtilité et une pureté de chant de bon aloi.

Dans les seconds rôles, (Arturo) caractérise son personnage avec justesse. La stature de (Raimondo) et le timbre agréable de (Normanno) agrémentent le tout, sans oublier l'Alisa incarnée de .

En fosse, telle une soirée de première, quelques décalages entre la direction d' et le plateau sont perceptibles, mais l'orchestre joue avec fluidité et élégance, faisant rejaillir la poétique du propos musical. Une lecture moins linéaire aurait été toutefois appréciable pour plus d'emphase, la partition de Donizetti fournissant des moments de fougues et une énergie éclatante.

Crédits photographiques : © Yann Cabello

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Gaetano Donizetti (1797-1848) : Lucia di Lammermoor, opera seria en trois actes sur un livret de Salvatore Cammarano. Mise en scène : Pierre Thirion-Vallet. Décor : Frank Aracil. Costumes : Véronique Henriot. Lumières : Véronique Marsy. Avec : Heera Bae, Lucia ; Jiwon Song, Enrico ; Ragaa Eldin, Edgardo ; Avi Klemberg, Arturo ; Federico Benetti, Raimondo ; Noriko Urata, Alisa ; Joseph Kauzman, Normanno. Chœur Opéra Nomade. Orchestre Les Métamorphoses, direction : Amaury du Closel

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