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Parsifal, le dernier opéra pour enfants de Wagner

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Bayreuth. 1-VIII-2023. Probebühne 4. Richard Wagner (1813-1883) : Parsifal, festival scénique sacré en trois actes, sur un livret du compositeur. Mise en scène : Ruth Asralda. Décor : Linda Tiebel. Costumes : Ilona Bühler, Marion Kral. Lumières : Peter Younes. Avec : Ølafur Sigurdarson, basse (Amfortas) ; Jens-Erik Aasbø, basse (Titurel). Andreas Hörl, basse (Gurnemanz) ; Jonathan Stoughton, ténor (Parsifal) ; Werner van Mechelen, baryton-basse (Klingsor) ; Nadine Weissmann, mezzo-soprano (Kundry) ; Julia Grüter, soprano/Marie Henriette Reinhold, alto/ Sonja Isabel Reuter, soprano/Margaret Plummer, mezzo-soprano (Filles-fleurs). Brandenburgisches Staatsorchester Frankfurt, direction : Azis Sadikovic

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Wagner compositeur d'opéras pour enfants ? A Bayreuth, c'est une évidence depuis 2009, date de l'arrivée de Katharina Wagner aux commandes du festival. En 2023, deux nouveautés : le Parsifal en réalité augmentée de Jay Scheib, et celui de à destination du jeune public.

Le succès cinématographique du Seigneur des anneaux a été planétaire, et surtout auprès des enfants. Pourquoi n'en aurait-il pas été de même avec L'Anneau du Nibelung, matrice, pillée dans les grandes largeurs, de la saga littéraire de Tolkien ? Et, partant, avec les autres opéras du Maître de Wahnfried, tous contes de fées envoûtant, depuis bientôt 150 ans, les ex-enfants du monde entier ? A côté du Ring, une aubaine pour tous les âges avec son anneau maudit, son casque magique, son dragon, son trésor, ses orages, ses incendies et ses catastrophes cosmiques, Parsifal n'est pas mal loti non plus avec son château, sa lance, son Graal, ses cloches, son jardin enchanté, ses filles-fleurs, son enchanteresse.

A ce jour, le Festival de Bayreuth aura montré par deux fois aux enfants, dans la Probebühne 4 (scène de répétition), la totalité des dix opéras de Wagner. Une démarche entreprise avec le plus grand sérieux et surtout le plus grand respect de son public : la preuve, c'est que ce Parsifal d'une heure et quart enchante, les petits qui découvrent, et les grands encore tout émoustillés du Parsifal de quatre heures au Festspielhaus.

Au plan musical, on n'a pas fait les choses à moitié : lorsque les vingt-cinq instrumentistes du Brandenburgisches Staatsorchester de Francfort, cachés derrière le décor, font entendre, sous la baguette experte et précise d' , les premières mesures du sublime Prélude, ils ne sont pas loin de faire aussi forte impression que la bonne centaine tapis dans l'abîme mystique du Festspielhaus. On n'entendra bien sûr que des extraits de la partition dans cette version très habilement condensée par Katharina Wagner et Marko Zdralek. Les tubes (hormis l'Enchantement du Vendredi-Saint) et les leitmotiv sont tous là. L'humour étant le meilleur entremetteur du monde, les textes parlés sont l'occasion de sourire un peu de cet opéra-cérémonial dont, jusqu'à naguère on n'applaudissait pas le premier Acte.

Parsifal, comme tous les opéras du répertoire, regorge d'occasions de faire s'esclaffer le public, par le biais d'un second degré savamment calculé. Une Kundry toute bleue en sorcière hirsute (impayable en Madame Mime de Merlin l'Enchanteur qui se serait pris un coup de jus) que Klingsor () envoie au charbon pour subtiliser le Graal dans un château d'opérette ; un Amfortas enfantin (après son Alberich granitique pour les grands, voici Ølafur Sigurdarson pour les petits, s'amusant comme un enfant dans son bain, en gros bébé douillet et boudeur, soucieux de complaire à papa Titurel, Jens-Erik Aasbø, bonhomme en diable ; un Gurnemanz plus joueur que d'ordinaire (gros capital de sympathie d') ; et même un groupe de Filles-fleurs-Ecuyères-Chevalières du Graal à tout faire ; enfin un Parsifal joliment chantant (, faussement niais) : toutes et tous ont peu à chanter, mais ils le font bien, manifestement ravis de cette distance souriante prise avec leur personnage.

Il faut dire que la mise en scène facétieuse de leur en donne régulièrement l'occasion, devant ou à l'intérieur d'un château de carton modulable. Un vrai ruisseau coule devant le pont-levis sur lequel s'ébat un adorable canard mécanique… Amfortas prend un vrai bain (de balles bleutées puisées dans un puits)… La lumière noire fait des merveilles avec les Filles-fleurs… Des fumigènes participent à la fête… Le public, chauffé par une comédienne végétalisée (Irmgard Seemann) ne se fait pas prier lorsqu'à plusieurs reprises, il est sollicité, notamment lorsqu'il s'agit de trouver un remède pour guérir Amfortas. Et après un finale très rassembleur, qui voit Kundry et Klingsor conviés à la Cérémonie du Graal (paillettes pour tous !), le petit canard peut s'ébattre à nouveau sur le ruisseau qui se remet à couler. Cerise sur le gâteau: on n'a pas souhaité épouvanter les enfants avec les peu progressistes Dienen! dienen! de Kundry…

Le plaisir de cette très jolie réussite donnée dix fois devant des salles combles et comblées, est prolongé par un livret pédagogique extrêmement bien fait (résumé, distribution, jeux, bricolage, questionnaire). On peut même se procurer le DVD des éditions précédentes. Un remarquable souci d'ouverture de la part du Festival de Bayreuth, qui offre également un concert gratuit en plein air de deux heures pleines (Wagner, Gerschwin, Verdi, Richard Strauss, Ravel, Berg, Aerosmith, Chostakovitch) en compagnie de l'Orchestre du Festival, d'Alberich, de Brünnhilde, et de … Katharina Wagner!

Crédits photographiques : © Jonas Lotz

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