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Mort d’un géant de la mise en scène d’opéra : Jorge Lavelli

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Metteur en scène argentin naturalisé français, né à Buenos Aires en 1932, débarqué en France à l'âge de 28 ans, est décédé à Paris à l'âge de 90 ans dans la nuit du 8 au 9 octobre 2023.

Du théâtre (il dirigea le Théâtre de La Colline de 1987 à 1996) où il mit en scène les plus grands (Shakespeare bien sûr : un merveilleux Conte d'hiver à Avignon avec Maria Casarès en 1980) comme les contemporains (Gombrowicz, Arrabal, Copi), il passa à l'opéra en 1975. Son Idoménée pour Angers ne fut pas pour rien dans la résurrection du chef-d'œuvre encore méconnu. Lavelli y imprimait sa marque, y enseignait notamment combien la plus impressionnante des tempêtes pouvait être réalisée avec des bouts de ficelles, ses houles de toiles inspirant même ses plus proches collègues (Chéreau, Mnouchkine…)

Comme le Ring du Centenaire l'année suivante à Bayreuth, son Faust pour Paris déclencha, en 1975, l'ire de l'arrière-garde, avec ses soldats dévastés, son jardin tendu de draps, ses Méphisto démultipliés sans plume au chapeau, sa Marguerite folle… avant d'acquérir le statut de référence absolue au fil d'une longévité (presque 30 ans !) qui le fit entrer dans le cénacle des rares réalisations passant de Garnier à Bastille.

Dès lors, il ne se passa pas une année sans un spectacle mis en scène par celui que toutes les maisons d'opéra se mirent à courtiser. Paris : un Pelléas et Mélisande en noir et noir à Garnier qui compte, avec celui de Katie Mitchell, parmi les plus aboutis de l'œuvre ; un vertigineux Oedipus Rex qui voyait ses personnages lutter contre le basculement à la verticale de son plateau, Medea de Rolf Liebermann. Aix : une Traviata d'une folle ambition esthétique autour de la magnétique Sylvia Sass ; des Noces de Figaro qui confinaient le problématique acte du jardin dans un castelet de marionnettes. Toulouse : un Fidelio entravé dans les geôles d'une dictature qu'il avait vue à l'œuvre dans son pays natal. Milan : une Butterfly qui arrachait les larmes avec son orphelin qui jouait à dérouler la chrysalide de sa mère suicidée.

Immédiatement reconnaissables mais toujours très proches de l'esprit des œuvres, les mises en scène de (et de son décorateur Max Bignens) étaient friandes des chocs esthétiques que l'opéra est censé produire. Une leçon qu'ont bien retenue ses héritiers. On dit aujourd'hui Le Songe de Carsen, le Tristan de Py, Le Messie de Guth, le Requiem de Castellucci, le Tannhaüser de Kratzer… Une terminologie qu'on peut faire remonter à ces années-là, où le Ring de Wagner, le Faust de Gounod devinrent le Ring de Chéreau, le Faust de Lavelli.

Crédits photographiques : © Opéra national de Paris

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