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Shades of Blue and White au Ballet de Stuttgart, une soirée sans grand frisson

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Stuttgart. Opernhaus. 3-V-2024. Shades of White and Blue.
La Bayadère, Acte des Ombres. Chorégraphie : Natalia Makarova ; décors : Jadwiga Maria Jarosiewicz. Avec Mackenzie Brown (Nikiya), Martí Paixà (Solor), Irene Yang, Abigail Willson-Heisel, Daiana Ruiz (trois Ombres).
Blake Works I. Chorégraphie : William Forsythe ; musique enregistrée : James Blake, The Colour in Anything. Avec Elisa Badenes, Jason Reilly ; Mackenzie Brown, David Moore ; Elisa Badenes, Miriam Kacerova, Agnes Su.
Septième Symphonie. Chorégraphie : Uwe Scholz ; décors et costumes : Uwe Scholz, d’après Beta Kappa de Morris Louis. Avec Anna Osadcenko, Jason Reilly.
Stuttgarter Ballett ; Staatsorchester Stuttgart ; direction : Mikhail Agrest

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William Forysthe et font pâle figure face à la géométrie implacable des Ombres de La Bayadère.

En 2018, le Ballet de Stuttgart avait proposé un spectacle tout en blanc sous le titre Shades of White ; en 2024, on voit cette fois des Shades of Blue and White, ce qui n'a pas un sens aussi fort, tant le blanc a, dans l'histoire de la danse, un poids particulier que cette bichromie n'a pas. La seule pièce commune des deux soirées est blanche : l'acte des Ombres de La Bayadère dans la version de ouvre celle fois la soirée, avec deux des plus récents Premiers danseurs de la troupe. Ce sont eux, plutôt que le corps de ballet ou les trois solistes des variations des Ombres, qui attirent l'attention : la descente des Ombres est un exercice d'uniformité, le moindre tremblement se voit – les danseuses du Ballet de Stuttgart ne répondent pas toujours parfaitement à ces exigences, mais au-delà des quelques faiblesses repérées la magie opère tout de même. Mackenzie Brown et Marti Paixà, eux, font honneur à la vocation classique qui reste celle du Ballet de Stuttgart : certes, leurs rôles ne permettent pas une grande part d'expression individuelle, mais la danse est impeccable, et on attend en particulier de voir Mackenzie Brown à l'avenir dans les grands rôles classiques.

La couleur bleue est ensuite représentée par Blake Works I de , une pièce qui laisse pantois. Lors de sa création au Ballet de l'Opéra de Paris, la pièce n'avait pas suscité l'enthousiasme dans nos colonnes. Elle suscite l'enthousiasme du public de Stuttgart, mais on reste confondu devant sa platitude conceptuelle, à l'égal de la prétentieuse médiocrité des chansonnettes de James Blake. Certes, la danse est vive, parfois d'une vélocité confondante, avec un sens de l'élévation qui rappelle qu'un grand chorégraphe est à l'œuvre, mais se contenter ainsi d'illustrer la musique quand elle est si banale, c'est faire perdre leur temps aux danseurs dont la virtuosité est surexploitée en vain. Les chansons s'enchaînent sans rien construire ; un premier duo, entre et , prend la forme d'une rencontre homme/femme réduite à ses contours abstraits, comme on en a vu dans tant de pièces néoclassiques ; le second entre Mackenzie Brown et , est à l'aune du reste de la pièce : bien écrit mais pauvre de sens et d'émotion. On admire à l'occasion tel ou tel soliste, notamment masculin, de la troupe, celle-ci étant plutôt mieux mise en valeur que les deux duos, mais cela n'explique pas le choix de faire entrer cette pièce au répertoire.

La dernière pièce de la soirée, elle aussi, ne fait pas beaucoup plus qu'illustrer la musique. La Septième symphonie de Beethoven, dans ces conditions, est un soulagement. Avouons-le, on a franchement oublié depuis son décès en 2004, et il n'a fait que quelques apparitions au programme des troupes françaises, à Strasbourg ou à Toulouse, jamais au Ballet de l'Opéra de Paris. C'est pour la troupe du Ballet de Stuttgart qu'il avait créé en 1991 cette version chorégraphique de la symphonie de Beethoven, quelques années après en avoir été le chorégraphe en résidence : la nostalgie peut expliquer le choix de reprendre la pièce, mais elle n'a pas très bien vieilli. Les couleurs tirées d'un tableau de Morris Louis (sur un fond blanc qui justifie l'insertion de la pièce dans la soirée) donnent le ton d'une pièce qui joue sur la légèreté, autour d'un couple entouré par un plantureux corps de ballet : la musique est illustrée, certes, mais on n'en tire pas l'impression d'une profondeur analytique particulièrement grande ; une certaine impression de flottement finit par s'imposer, sans qu'on puisse savoir si elle est due à la chorégraphie ou au remontage de la pièce. Le duo central, et le toujours impeccable , n'y peut rien : on attend en vain un peu de vertige. Heureusement, l'Orchestre national de Stuttgart dirigé par fait mieux que livrer une bande-son dans la fosse de l'Opéra : peut-être le contexte nous incite-t-il à l'indulgence, mais il est trop rare au ballet que la musique soit à la hauteur de la danse pour ne pas en remercier les musiciens.

Crédits photographiques © Stuttgarter Ballett

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Stuttgart. Opernhaus. 3-V-2024. Shades of White and Blue.
La Bayadère, Acte des Ombres. Chorégraphie : Natalia Makarova ; décors : Jadwiga Maria Jarosiewicz. Avec Mackenzie Brown (Nikiya), Martí Paixà (Solor), Irene Yang, Abigail Willson-Heisel, Daiana Ruiz (trois Ombres).
Blake Works I. Chorégraphie : William Forsythe ; musique enregistrée : James Blake, The Colour in Anything. Avec Elisa Badenes, Jason Reilly ; Mackenzie Brown, David Moore ; Elisa Badenes, Miriam Kacerova, Agnes Su.
Septième Symphonie. Chorégraphie : Uwe Scholz ; décors et costumes : Uwe Scholz, d’après Beta Kappa de Morris Louis. Avec Anna Osadcenko, Jason Reilly.
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