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L’Autre Coté de Mantovani : éloge à la jeunesse au XXIVe Festival Musica de Strasbourg

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Strasbourg. Opéra National du Rhin 23-09-2006. Bruno Mantovani (né en 1974) : l’Autre côté, opéra fantastique en un prologue et deux actes sur un livret de François Regnault. Mise en scène, Emmanuel Demarcy-Mota. Scénographie et lumière, Yves Collet. Avec : Fabrice Dalis, Kubin ; Maryline Fallot, Madame Kubin ; Lionel Peintre, Gautsch, Teretatian, l’huissier, l’américain ; Avi Klemberg, le coiffeur ; Sylvia Vadimova, l’éditeur ; Robert Expert, Lampenbogen, Le médecin ; Jean-Loup Pagésy, Son Excellence, Patéra. Chœur de l’Opéra National du Rhin (chef de chœur : Michel Cappéron), Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Percussions de Strasbourg, direction : Bernhard Kontarsky.

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Pour sa vingt-quatrième édition, Musica, le Festival International des Musiques d'Aujourd'hui de Strasbourg, s'est installé sur les bords de l'Ill, dans la nouvelle Cité de la Musique conçue par Henry Gaudin, somptueux édifice dévolu à la Culture et à sa diffusion qui abrite les locaux du Conservatoire et met à disposition un superbe auditorium accueillant les concerts de musique de chambre.

Une édition « sous forme d'éloge à la jeunesse » nous dit son directeur , puisque Musica associé à la SACEM et au FESAM consacre trois concerts matinaux à la découverte de la musique de jeunes compositeurs et met à l'honneur qui, à moins de trente deux ans, présente son premier opéra l'Autre côté, donné en création mondiale pour l'ouverture de la saison de l'Opéra National du Rhin ce samedi 22 septembre. Huit autres partitions comptant ses Quatre pièces pour quatuor à cordes – une somme de quarante minutes de musique interprétée par le – et la première mondiale de sa Cantate n°1 sur des poèmes de – un parcours d'une étonnante charge expressive réunissant les « neue vocalsolisten » et l' – complètent le portrait de ce phénomène hors norme, travailleur boulimique affichant déjà une soixantaine d'œuvres à son catalogue et revendiquant haut et fort son rapport à la tradition par le biais d'un langage qu'il envisage davantage en termes de synthèse que d'innovation à tout prix.

Lorsque demande à d'adapter le roman fantastique d'Alfred Kubin Die andere Seite – « L'autre côté » – son désir est d'assumer le genre de l'opéra en tant que tel – d'en accepter la convention au pied de la lettre – avec une action suivie et le vocabulaire dramaturgique approprié. Conçu en un prologue et deux actes, le livret retrace en une sorte de flash back et dans une atmosphère d'inquiétante étrangeté – celle qui nourrit également les visions oniriques et fantastiques des dessins de Kubin – la grandeur et la décadence de « l'Empire du rêve » créé de toutes pièces par le richissime Patera ; cet absurde refuge contre tout progrès plonge dans le chaos sous l'action destructrice de l'américain arrivant au deuxième acte pour évincer l'imposteur et s'arroger le gouvernement de l'Empire…toute ressemblance avec une situation ou un personnage connus ne serait que pure coïncidence pourrait-on ajouter bien que la dimension politique qui entre en résonance – pour c'est au chœur d'en assumer la portée – ne trouve jamais dans ce conte fantastique un véritable modèle même si Kubin, terminant son roman en 1909, semble bien régler ses comptes avec la société autrichienne de son temps.

Il importe tout d'abord au compositeur de rendre intelligible le texte français soumis à un travail de prosodie très différenciée visant la caractérisation psychologique des personnages. Pour éviter au chant français « de sonner kitsch », Mantovani privilégie un débit rapide qui saisit l'attention et, durant les deux heures et demi de musique, sous-tend le rythme du spectacle et l'angoisse grandissante de cet univers cauchemardesque qui bascule dans la folie. Remarquablement investi dans le rôle de Kubin dont il assume avec virtuosité toutes les exigences de l'écriture vocale, tient le devant de la scène et conduit la narration en ménageant une étonnante progression dramatique. A ses côtés, saluons les qualités tant vocales que scéniques de dans le rôle de l'éditeur et les facettes multiples de qui s'impose avec brio sous les traits du despote américain.

Imaginant un décor de structures métalliques baignées de sombres éclairages, cerne un espace carcéral qui se transforme au fil des scènes. Mais c'est de l'orchestre puissamment cuivré, cerné par les émergeant des loges du théâtre – et sous la conduite de – que jaillit la violence panique de certaines scènes, celle de l'orgie du deuxième acte par exemple dont la vague instrumentale submerge l'action théâtrale et dans les vastes interludes où le fantastique semble ouvrir des portes à l'imagination sonore et visionnaire de Bruno Mantovani. Comme si l'utopie noire de Kubin ne faisait que stimuler « l'empire du rêve » de ce tempérament fougueux amateur de juxtapositions abruptes qui, au lendemain de sa création, avoue avoir mis la première main à un second ouvrage lyrique avec, comme compagnon de route, son désormais fidèle dramaturge .

Crédit photographique : © / Opéra National du Rhin 2006 et Alain Kaiser

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Strasbourg. Opéra National du Rhin 23-09-2006. Bruno Mantovani (né en 1974) : l’Autre côté, opéra fantastique en un prologue et deux actes sur un livret de François Regnault. Mise en scène, Emmanuel Demarcy-Mota. Scénographie et lumière, Yves Collet. Avec : Fabrice Dalis, Kubin ; Maryline Fallot, Madame Kubin ; Lionel Peintre, Gautsch, Teretatian, l’huissier, l’américain ; Avi Klemberg, le coiffeur ; Sylvia Vadimova, l’éditeur ; Robert Expert, Lampenbogen, Le médecin ; Jean-Loup Pagésy, Son Excellence, Patéra. Chœur de l’Opéra National du Rhin (chef de chœur : Michel Cappéron), Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Percussions de Strasbourg, direction : Bernhard Kontarsky.

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